Monsieur Florian MALAPEYRE*, Directeur général de Créateck Paysage, entreprise de paysagisme en Gironde

et 

Maître Dominique PETIT**, référent de l'association ARBRES 33 et Notaire associé des Etudes 3 Rives, offices notariaux à Bordeaux et Libourne
se demandent : 


Pourquoi et comment, préserver le capital arboré dans un projet immobilier ? 



 
 

Un premier constat côté Paysagiste :

Au cœur des problématiques environnementales et écologiques en ville, la végétalisation et la conservation des espaces arborés sont au cœur de l’actualité. 

Les consciences s’éveillent, l’attrait pour le végétal se développe et la demande s’en ressent.

Particuliers, professionnels ou encore collectivités souhaitent aménager leurs espaces, mais nous contactent, bien trop souvent, en fin de projet. 

Ainsi, pour faciliter les travaux de construction, les végétaux sont coupés et le patrimoine arboré disparaît peu à peu des zones urbaines. Après des années de développement, ce rouage de la biodiversité est remplacé, et il lui faudra autant de temps pour se reconstruire.

 

Et un second côté Notaire :

75% de la population française réside en zone urbaine. Nous notons chez cette clientèle une volonté croissante d’avoir plus d’espaces arborés dans leur cadre de vie.

Pour autant, les arbres présents dans les jardins ou terrains sont peu considérés et n’ont pas de valeur quantifiée ou de protection juridique propre. Lors d’une vente, on ne parle pas d’espace arboré. Seuls les m2 habitables sont valorisés.

Un changement s’amorce toutefois avec nos premiers clients exprimant le souhait de protéger les arbres qui leur sont chers lors d’une vente. Dans notre étude des Trois Rives, nous nous sommes organisés pour les accompagner dans ce sens.

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Une problématique commune :

Que ce soit pour la construction d’une maison individuelle ou d’un habitat collectif, prendre le temps de mesurer la valeur que les arbres existants peuvent apporter au futur projet, les intégrer dans une réflexion globale, pourrait tout changer.

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Valoriser, oui mais pourquoi et comment ?

 

Pourquoi en effet est-ce important de protéger les arbres existants ?

 

1/ Pour de nombreuses raisons écologiques tout d’abord, parmi lesquelles :

Leur rôle crucial dans la qualité de l'air en ville : un arbre adulte retient en moyenne 100 kg de poussières par an et absorbe le CO2 que nous rejetons. Le carbone capté permet à l’arbre de créer de la matière organique nécessaire à sa croissance.  

L’arbre se comporte aussi comme un piège à polluants (polluants industriels, métaux lourds etc…) Une étude récente a d’ailleurs mis en lumière la capacité des bouleux à emprisonner les micro plastiques du sol dans leurs tissus racinaires.

Chaque arbre contribue à lutter contre les îlots de chaleur urbains par son ombre projetée et par évapotranspiration, à améliorer la ventilation et la température des villes et à filtrer les diverses particules et polluants de l'atmosphère.

Les racines retiennent les terres, favorisent l’infiltration et l’absorption des eaux pluviales et diminuent les risques d’inondation.

Enfin, par sa présence, l'arbre confère un abri et de la nourriture à de nombreuses espèces animales et végétales, qui à leur tour attirent des espèces qui leur sont associées. Ainsi, se forme et se développe une véritable biodiversité nécessaire au bon équilibre écologique de la ville.

 

2/ Pour des raisons urbanistiques et esthétiques.

L’arbre est un ornement qui contribue par sa forme, sa taille, ses couleurs à l’embellissement du bien et de son quartier. Il participe à la structuration du paysage urbain et offre une protection bienvenue en matière de vis-à-vis.

La canopée améliore notre confort quotidien en nous protégeant des intempéries, des effets indésirables du soleil et de la chaleur.

Le patrimoine arboré contribue enfin à structurer un paysage : allée d’arbres aux abords des routes et chemins, délimitation d’espaces paysagers, parasols naturels etc…

L’arbre est une véritable composante de l’urbanisme.

 

3/ Pour le rôle qu’ils jouent sur nos relations sociales et notre santé, ensuite.

Oasis au cœur d’un espace souvent minéral, distributeur de bien-être et de fraîcheur, les espaces boisés adoucissent notre vie urbaine et dépolluent l’air que nous respirons.

Ils nous offrent un lien avec les saisons et représentent des lieux de déconnexion et de détente. Ils créent une sensation de liberté et de bien-être.

L'espace boisé représente aussi un espace de détente propice aux activités physiques ou de plein air, aux rencontres et aux échanges.

Une étude japonaise a démontré qu’une exposition aux arbres réduisait l’anxiété et le stress, améliorait la concentration, l’humeur et le sommeil, et stimulait le système immunitaire.

 

4/ Et enfin, pour les bénéfices économiques qu’ils représentent.

De façon directe tout d’abord, « parce qu’un bien arboré se vend mieux et plus facilement qu’un bien sans arbres » selon nos experts.

De façon indirecte ensuite parce que la régulation naturelle de la température réduit les besoins énergétiques pour chauffer ou climatiser, le risque d’inondation, et ses coûts associés, diminue, la stabilisation et le drainage du sol limitent l’érosion et ses conséquences.

En créant enfin de la valeur ajoutée, car la végétalisation d’une ville participe à son attractivité.

 

 

Comment valoriser son patrimoine arboré existant ?

                Pour valoriser un patrimoine arboré, le Copalme (l’association d’arboristes élagueurs grimpeurs), et le CAEUE 77 (Conseil d’Architecture d’Urbanisme et de l’Environnement de Seine-et-Marne), ont développé l’outil VIE***. Celui-ci permet de calculer une estimation de la valeur des arbres.

 

Idéalement, comment cela pourrait se traduire ?

À l’instar de l’évaluation d’une maison par une agence immobilière, vous pouvez faire appel à un professionnel comme le paysagiste pour l’expertise de votre patrimoine arboré.

Celui-ci réalise un diagnostic des arbres sur place : essence, dimensions, état physiologique et sanitaire notamment. Grâce à ses connaissances et au Barème de l’arbre***, le professionnel établit aussi une mesure financière du patrimoine arboré et vous fournit une attestation de cette valeur.

Cette évaluation pourra être utilisée dans le cadre d’une vente, d’une demande de protection, ou encore dans l’estimation de dommages et intérêts.

Cette démarche permet l’obtention :

D’une expertise fiable de l’état de santé de l’arbre, son caractère de dangerosité et son intérêt environnemental, tout en évitant les abus possibles en la matière.

D’une évaluation cohérente selon l’état de l’arbre, son âge et son intérêt ornemental.


Villa avec et sans patrimoine arboré

 

Exemple avec une simulation financière de la valeur arborée de la villa présentée en image :


Le patrimoine arboré de cette villa est principalement composé de Pinus pinea (Pin parasol) d’une cinquantaine d’années environ, et d’une hauteur de 5 à 6 m.

Les Pinus pinea étudiés sur la propriété sont sains et possèdent une vigueur normale. Ils procurent un caractère ornemental indéniable et participent à une réduction de chaleur importante sur le terrain. Cette essence n’est pas protégée et ne cause aucune gêne, ni désagrément.

Après application du barème et analyses complémentaires, le paysagiste établit une valeur euro de 14 700 € par arbre.

 

Le patrimoine arboré est estimé à plus de 225 400€. Si lors du projet de construction de la villa les propriétaires avaient opté pour la coupe de ces arbres à proximité de la maison, six au total, ils se seraient privés d’un patrimoine arboré estimé à 88 200 €. 

 

 

3 façons de protéger son patrimoine arboré :

 

  • En inscrivant l’espace boisé au Plan local d’urbanisme :

Le moyen le plus sûr pour protéger un arbre est de l’inscrire en tant qu’Espace Boisé Classé (EBC) dans le Plan Local d’Urbanisme (PLU). Dans ce cas, l’arbre ne peut pas être abattu sans autorisation (sauf s’il est dangereux). La législation a évolué au cours du temps. Le texte qui, à l’origine, permettait seulement de protéger une surface boisée, autorise aujourd’hui de protéger un parc, une haie, un alignement et même un arbre isolé. Article L130-1 du code de l’urbanisme.

L’article 123-1-5 du Code de l’urbanisme permet aussi de localiser, dans les PLU, des éléments de paysage à protéger et de définir des prescriptions de nature à assurer leurs préservations

 

  • En sollicitant l’Association ARBRES **** pour une labellisation :

Vous avez un arbre ou un ensemble arboré remarquable sur votre propriété ? Vous pouvez soumettre leur candidature aux labels ‘ ARBRE REMARQUABLE DE France ‘ ou « ENSEMBLE ARBORE REMARQUABLE », candidature qui sera examinée par le comité de labellisation. (www.arbres.org). Ces labels sont un engagement d'entretien, de sauvegarde et de mise en valeur des arbres en question, considérés désormais comme patrimoine naturel et culturel.

 

  • En allant chez votre notaire :

pour la rédaction d’un acte notarié de servitude particulière, visant à protéger juridiquement un ou plusieurs arbres lors d’une vente.

 

Notre conclusion :

Dans le cadre d’un projet de construction les bénéfices apportés par les arbres, tant en matière de qualité de vie ultérieure qu’en facilité de vente ou de location des biens doit être valorisé.

Tout en étant partenaires et conseillers des professionnels de la construction, nous souhaitons mieux les sensibiliser sur l’importance et la valeur ajoutée d’un arbre, ou d’un espace arboré, existant et de sa conservation.

 

Repenser la place de l’arbre dans un projet immobilier sera un atout pour tous.